Le principe d’égalité est une règle fondamentale du système juridique de l’Union, qui est aujourd’hui consacrée aux art. 20 et 21 de la Charte. Il se trouve au sommet d’un cadre réglementaire structuré visant à lutter contre les discriminations, qui est constitué de dispositions de la Charte, des traités et du droit dérivé (notamment des directives), ainsi que d’arrêts novateurs de la Cour de justice, ayant souvent préconisé des solutions qui ont été ensuite transposées par le législateur. Dès l’origine, la règle de l’égalité a été posée comme l’élément clé du processus d’intégration européenne. Tel qu’il a été configuré par la jurisprudence, par le législateur de l’Union et par la doctrine, le principe général d’égalité présente donc un haut degré de flexibilité, en pouvant être remodelé en fonction du moment historique que l’on considère. L’évolution de la jurisprudence ayant trait au principe d’égalité et aux interdictions spécifiques en matière de discrimination a accompagné le processus d’intégration européenne, en présentant des contenus nouveaux et des acceptions toujours plus riches mais aussi, parfois, des solutions qui renvoyaient aux choix effectués au niveau national par les États membres. La contribution est centrée sur le fait de savoir si le principe général d’égalité est doté de l’effet direct, c’est-à-dire s’il est en mesure de créer, pour les particuliers, un droit à la non-discrimination susceptible d’être invoqué devant les juridictions nationales et pouvant entraîner par ailleurs l’inapplicabilité des dispositions nationales contraires. Les conditions générales requises pour l’effet direct (précision suffisante et inconditionnalité), élaborées par la Cour de justice, peuvent également s’appliquer aux principes généraux. Dès lors que ces conditions sont remplies, les règles de conduite, intégrées à ces sources non écrites, sont susceptibles de créer des droits subjectifs à l’avantage des particuliers, que ces derniers peuvent invoquer devant les juridictions nationales. La règle générale d’égalité, dans sa simplicité même, répond à ces conditions. Elle définit en effet clairement la teneur de sa prescription – qui interdit toute distinction injustifiée entre des cas de figure similaires – ainsi que les destinataires actifs et passifs visés par cette interdiction, qui sont évidemment tous les justiciables. En outre, le principe en question – bien que susceptible d’être mieux précisé dans des dispositions particulières constituant une expression spécifique de celui-ci – peut s’appliquer en soi dans les cas entrant dans le champ d’application des traités, même en l’absence de précisions fournies par le législateur de l’Union ou ceux des États membres. C’est justement pour cela que les particuliers peuvent s’en prévaloir directement devant les juridictions nationales qui sont tenues, pour leur part, de l’appliquer sans délai pour régler les litiges dont elles se trouvent saisies. Le principe d’égalité déploie ses effets sur tous les associés et peut donc être directement évoqué par les particuliers, même dans le cadre des litiges horizontaux. Le rapport entre le principe d’égalité et les directives 2000/43 et 2000/78 n’est pas celui qui existe entre une règle incomplète et conditionnelle et les dispositions nécessaires à l’intégration de son contenu. La bonne vision des rapports existant entre ces différentes sources est celle qui est axée sur l’existence d’une interdiction générale, suffisamment précise et inconditionnelle en soi – mais qui, toutefois, ne peut rien faire d’autre qu’interdire les discriminations. Celle-ci est assortie d’une série de dispositions du droit dérivé, introduisant des instruments à caractère matériel, procédural et administratif permettant de lutter concrètement contre les discriminations visées et de promouvoir l’égalité selon des critères d’effectivité élevés. La réglementation de ces mesures ne remet pas en question l’existence du principe général d’égalité et son effet direct, mais s’appuie véritablement sur ces présupposés.

L’effet direct du principe général d’égalité: un élément clé du droit antidiscriminatoire de l’Union européenne

fabio spitaleri
2018-01-01

Abstract

Le principe d’égalité est une règle fondamentale du système juridique de l’Union, qui est aujourd’hui consacrée aux art. 20 et 21 de la Charte. Il se trouve au sommet d’un cadre réglementaire structuré visant à lutter contre les discriminations, qui est constitué de dispositions de la Charte, des traités et du droit dérivé (notamment des directives), ainsi que d’arrêts novateurs de la Cour de justice, ayant souvent préconisé des solutions qui ont été ensuite transposées par le législateur. Dès l’origine, la règle de l’égalité a été posée comme l’élément clé du processus d’intégration européenne. Tel qu’il a été configuré par la jurisprudence, par le législateur de l’Union et par la doctrine, le principe général d’égalité présente donc un haut degré de flexibilité, en pouvant être remodelé en fonction du moment historique que l’on considère. L’évolution de la jurisprudence ayant trait au principe d’égalité et aux interdictions spécifiques en matière de discrimination a accompagné le processus d’intégration européenne, en présentant des contenus nouveaux et des acceptions toujours plus riches mais aussi, parfois, des solutions qui renvoyaient aux choix effectués au niveau national par les États membres. La contribution est centrée sur le fait de savoir si le principe général d’égalité est doté de l’effet direct, c’est-à-dire s’il est en mesure de créer, pour les particuliers, un droit à la non-discrimination susceptible d’être invoqué devant les juridictions nationales et pouvant entraîner par ailleurs l’inapplicabilité des dispositions nationales contraires. Les conditions générales requises pour l’effet direct (précision suffisante et inconditionnalité), élaborées par la Cour de justice, peuvent également s’appliquer aux principes généraux. Dès lors que ces conditions sont remplies, les règles de conduite, intégrées à ces sources non écrites, sont susceptibles de créer des droits subjectifs à l’avantage des particuliers, que ces derniers peuvent invoquer devant les juridictions nationales. La règle générale d’égalité, dans sa simplicité même, répond à ces conditions. Elle définit en effet clairement la teneur de sa prescription – qui interdit toute distinction injustifiée entre des cas de figure similaires – ainsi que les destinataires actifs et passifs visés par cette interdiction, qui sont évidemment tous les justiciables. En outre, le principe en question – bien que susceptible d’être mieux précisé dans des dispositions particulières constituant une expression spécifique de celui-ci – peut s’appliquer en soi dans les cas entrant dans le champ d’application des traités, même en l’absence de précisions fournies par le législateur de l’Union ou ceux des États membres. C’est justement pour cela que les particuliers peuvent s’en prévaloir directement devant les juridictions nationales qui sont tenues, pour leur part, de l’appliquer sans délai pour régler les litiges dont elles se trouvent saisies. Le principe d’égalité déploie ses effets sur tous les associés et peut donc être directement évoqué par les particuliers, même dans le cadre des litiges horizontaux. Le rapport entre le principe d’égalité et les directives 2000/43 et 2000/78 n’est pas celui qui existe entre une règle incomplète et conditionnelle et les dispositions nécessaires à l’intégration de son contenu. La bonne vision des rapports existant entre ces différentes sources est celle qui est axée sur l’existence d’une interdiction générale, suffisamment précise et inconditionnelle en soi – mais qui, toutefois, ne peut rien faire d’autre qu’interdire les discriminations. Celle-ci est assortie d’une série de dispositions du droit dérivé, introduisant des instruments à caractère matériel, procédural et administratif permettant de lutter concrètement contre les discriminations visées et de promouvoir l’égalité selon des critères d’effectivité élevés. La réglementation de ces mesures ne remet pas en question l’existence du principe général d’égalité et son effet direct, mais s’appuie véritablement sur ces présupposés.
2018
9788892114043
9788892174580
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